Cette paraphrase d’une citation de Molière (Couvrez ce sein que je ne saurais voir) illustre bien la situation des urgences dénoncée la semaine dernière par le quotidien La Presse. L’enquête de la journaliste révèle que des « unités de débordement » sont créées par les hôpitaux québécois afin de sortir des patients de l’urgence. Ainsi, ils ne sont plus comptabilisés dans les statistiques de cette unité.
Source : SRC.
Cette réaction des administrations hospitalières feraient suite à la demande du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, d’éliminer en une semaine l’attente aux urgences. Choqué de voir que les 100 millions de dollars supplémentaires investis par le gouvernement avant Noël pour améliorer la situation ne portaient pas leurs fruits, le ministre avait déclaré qu’il y aurait des « conséquences » si le problème n’était pas réglé rapidement.
Or, ces unités de débordement ne datent pas d’hier, rappelle Michel David du Devoir. « Le commun des mortels avait découvert à l’automne 2006 un aspect du système de santé qu’on avait caché comme une maladie honteuse. Pour masquer une réalité passablement embarrassante pour le gouvernement Charest, le trop-plein des urgences était déversé dans ce qu’on appelait pudiquement des unités de débordement » écrit le chroniqueur.
Au cabinet de M. Barrette, on affirme que le ministre « n’a pas d’indications » voulant que les hôpitaux de la province adoptent des mesures cosmétiques pour régler le problème des urgences. L’objectif est que les patients soient dirigés vers les ressources appropriées.
« Comptabilité créative »
Le problème c’est que bien qu’ils soient physiquement sortis de l’urgence, les patients demeurent couchés sur des civières à divers endroits de l’hôpital - une salle de réunion, à côté de l’urgence, dans un couloir - et ne sont pas toujours transférés dans des chambres aux étages.
Et lorsqu’ils le sont, ce n’est pas toujours dans les meilleures conditions. Parmi les autres méthodes adoptées, certains établissements montent plus rapidement des patients aux étages. Ceux-ci y attendent sur des civières dans les corridors. Dans d’autres hôpitaux, des chambres pour deux patients ont été transformées en chambre pour trois. Ces méthodes de « comptabilité créative » pour réduire artificiellement le taux d’occupation des urgences ne se font pas sans inquiéter les professionnels de la santé.
Inquiétudes de la FIQ
La présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, Régine Laurent, estime que la situation actuelle où des patients sont « cachés » pour améliorer la performance des urgences était prévisible. « On a demandé aux PDG de régler en une semaine ce qui dure depuis 15 ans... », apporte-t-on dans l’article de La Presse.
Mme Laurent est inquiète car plusieurs unités de débordement « sont inadéquates pour la sécurité des patients ». Selon elle, tant que le gouvernement n’investira pas plus en soins à domicile et en hébergement, la problématique des urgences perdurera. « Le ministre de la Santé a la responsabilité de prendre soin de la santé de la population. Là, il dit simplement : "Cachez ce que je ne saurais voir" », dit-elle en conclusion.
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