J’avais abordé le sujet lorsque l’Association médicale du Québec (AMQ) a tenu son symposium sur le surdiagnostic au printemps dernier. Si j’y reviens cette semaine, c’est que l’AMQ a dévoilé récemment son plan d’action qui permettrait, selon l’organisme, des économies importantes au réseau de santé québécois.
Rappelons les faits. Ce premier symposium sur le surdiagnostic regroupait les principaux intervenants du réseau de la santé : médecins, représentants d’associations médicales, du Collège des médecins et d’autres ordres professionnels, d’agences régionales et des groupes de défense des patients.
Tout ce beau monde semble s’être entendu sur le fait qu’il y avait trop de tests médicaux, trop de traitements, trop de prescriptions de médicaments qui s’avèrent souvent inutiles, voire dangereux. Il fallait faire quelque-chose pour freiner cette escalade qui coûte des fortunes. À noter que ce phénomène ne serait pas particulier au Québec, mais constaté dans la plupart des pays industrialisés.
On dirait que plus la science avance, plus les techniques se raffinent, plus les médecins nous découvrent des bobos à traiter : des bobos avec lesquels nous aurions pu vivre sans trop de conséquences. Des exemples sont donnés dans un grand dossier que présente le magazine L’Actualité dans son édition de septembre.
Dans un très long article intitulé Halte au surdiagnostic !, la journaliste Valérie Borde interroge plusieurs spécialistes (généraliste, oncologue, chirurgien, médecin légiste) et des patientes qui témoignent des méfaits de la médicalisation à outrance.
« Si le surdiagnostic est si fréquent, c’est surtout parce qu’il profite aux puissants industriels de la santé, fabricants de tests, d’appareils médicaux et de médicaments, qui influencent largement la rédaction des guides de pratique clinique » écrit-elle au terme d’une longue enquête.
Mais ce ne sont pas les seuls coupables. Les patients que nous sommes peuvent également faire leur mea culpa. Allez ! Admettez-le. Si vous attendez depuis trois mois pour voir un médecin et que vous ressortez sans prescription parce que celui-ci vous a dit de simplement modifier vos habitudes de vie, avouez que vous allez être frustrés. Pire, vous allez mettre en doute sa compétence. Pourtant, il aura eu probablement raison.
Dans les faits, la problématique est beaucoup plus complexe. C’est tout un système, une culture qu’il faut repenser. Et surtout enclencher des actions significatives pour changer les choses. L’Association médicale du Québec a demandé la semaine dernière à rencontrer le ministre de la Santé, Gaëtan Barrette, afin de coordonner les efforts qui devront être déployés au cours des prochaines années pour atteindre les résultats attendus.
L’attachée de presse du ministre a répondu que le problème relevait du Collège des médecins et non du ministre. Des propos qui ont fait réagir la journaliste Valérie Borde dans son blogue sur le site de L’Actualité.
« ...seul le ministre a le pouvoir d’enclencher les réformes qui s’imposeraient — dans le mode de rémunération des médecins, par exemple — pour faire en sorte qu’il les encourage à faire « mieux » plutôt que « plus ». Monsieur Barrette a-t-il peur de heurter la susceptibilité de ses anciens collègues ? Craint-il de perdre du capital politique dans le grand ménage qui s’impose, et que certains pourraient percevoir comme une manière de couper dans les sacro-saints soins à la population ? » écrit-elle.
« Le Québec a besoin d’un homme fort pour s’attaquer au surdiagnostic et en faire comprendre les enjeux à la population comme au milieu de la santé. Si rien n’est fait, ce fléau continuera d’engloutir toujours plus d’argent sans profiter aucunement aux Québécois. Monsieur le ministre, à vous de jouer ! » a-t-elle conclu.
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Messages de forum
1. Halte au surdiagnostic !, 25 août 2014, 20:50, par Denis Poitras
Une partie de la solution revient au ministre. S’il présentait une loi obligeant tout hôpital, etc. à dévoiler les fautes sous peine de sanction grave jusqu’à la suspension (médecins et administrateurs), on réglerait une partie du problème.
Une autre partie du problème vient des assureurs qui demandent aux professionnels de ne rien reconnaître sous peine de voir leur assurance responsabilité devenir caduque. Actuellement, on surdiagnostique pour éviter les poursuites.
Il faudrait donc accompagner cela d’une autre mesure empêchant les gens de poursuivre médecins et hôpitaux, mais accordant des compensations.
On a vu ce que cela a fait avec l’assurance automobile. Nos coûts ont été considérablement réduits.